Les Marqueurs de L’asynchronisme Ventriculaire
La stimulation biventriculaire est maintenant bien établie comme étant un traitement efficace pour l’insuffisance cardiaque chez des patients sélectionnés. Néanmoins, environ 20% de ces patients ne répondent pas favorablement à cette thérapie, dont le mécanisme d’action est de mieux coordonner une contraction cardiaque désynchronisée. Afin d’améliorer la sélection des patients, il parait logique que la mise en évidence d’un asynchronisme de la contraction pourrait augmenter la probabilité de bénéfice de ce traitement.
L’asynchronisme peut siéger à trois niveaux: (1.) Atrioventriculaire (entre les oreillettes et les ventricules); (2.) interventriculaire (entre les deux ventricules) et (3.) intraventriculaire (entre les différents parois du ventricule gauche). C’est probablement le dernier mécanisme qui joue le rôle le plus important dans l’insuffisance cardiaque.
L’électrocardiogramme (ECG): Alors même qu’il existe une corrélation entre l’asynchronisme électrique (avec un QRS élargi) et l’asynchronisme mécanique, il a été démontré que l’ECG de surface est un indicateur imprécis de la présence d’un asynchronisme de la contraction. Ainsi, environ 30% des patients insuffisants cardiaques avec un QRS élargi ne remplissent pas les critères d’un asynchronisme mécanique. Inversement, 40–50% des patients avec un QRS fin remplissent ces critères. Néanmoins, l’ECG joue encore un rôle important comme critère d’indication, car toutes les grandes études sur la CRT ont sélectionnés les patients avec un QRS élargi, et ce critère fait partie des dernières recommandations américaines et européennes sur l’indication à la CRT datant de 2005.
Ventriculographie isotopique: La scintigraphie myocardique par analyse de phase permet d’analyser l’asynchronisme inter- et intraventriculaire. Toutefois, cette technique est peu diffusée, et a une résolution temporelle limitée.
Résonance magnétique: Cette technique est surtout utilisée dans la recherche, car elle demande une analyse des données poussée, et a une disponibilité limitée.
Echocardiographie: C’est la technique d’imagerie la plus utilisée pour mesurer l’asynchronisme. Il existe plusieurs modes d’acquisition (Doppler pulsé au niveau des valves aortique et pulmonaire, M-mode, Doppler tissulaire et échocardiographie 3D). Parmi ces modes, c’est le Doppler tissulaire qui a fait l’objet du plus grand intérêt. Toutefois, il n’y a actuellement aucun consensus sur la méthode de choix pour mesurer l’asynchronisme à l’échocardiographie (échographie standard vs Doppler tissulaire, nombre de segments à analyser, points de mesure sur les courbes de vélocité, calculs sur les mesures etc.). Il est important de noter qu’il n’existe aucune méthode servant d’«étalon d’or» pour diagnostiquer l’asynchronisme.
Des données provenant d’une étude hollandaise suggèrent qu’un délai intraventriculaire gauche de >65 ms (entre 4 segments basaux en Doppler tissulaire vélocité couleur) permettent de prédire la réponse clinique à la CRT. D’autres indices ont été également été rapportés. Toutefois, l’enthousiasme pour appliquer ces techniques à la pratique courante doit être pondéré. Les données des différentes études sur ces indices proviennent en général de centres uniques, dont les résultats encourageants ne sont pas toujours retrouvés par d’autres investigateurs (ce qui souligne la complexité de l’interprétation du Doppler tissulaire, dont la reproductibilité est limitée). La CRT a fait sa preuve d’efficacité chez >4000 patients dans des études randomisés et contrôlées, n’utilisant pas des critères d’asynchronisme pour sélectionner des patients. Les études se portant sur les marqueurs échographiques chez des patients candidats à une CRT sont de taille modeste (d’un maximum de seulement 85 patients). Dans l’attente des résultats d’études multicentriques actuellement en cours qui permettront de mieux définir la place de l’échocardiographie dans la sélection des patients pour la CRT, cette thérapie doit être considérée à tout patient remplissant les critères standards reconnus (NYHA III/IV réfractaire au traitement médical, QRS >120 ms, et fraction d’éjection ventriculaire gauche ≤35%).
Les Marqueurs de la Douleur Thoracique
L’utilisation de marqueurs biologiques prend un part croissante dans le diagnostic des maladies cardiovasculaires. Les multiples étiologies de la douleur thoracique et son pronostic parfois défavorable expliquent le développement continuel de nouveaux marqueurs à la fois plus sensibles et spécifiques. Le dosage de la troponine (cTn) représente un progrès majeur dans la prise en charge de ces patients en raison d’une excellente performance et d’un dosage de plus en plus facile à effectuer. La cTn (que ce soit la forme I ou la T) permet non seulement une stratification du risque pour chaque patient mais également d’établir une stratégie thérapeutique notamment pour une prise en charge interventionnelle précoce. Malgré des faux positifs, notamment chez les patients insuffisants rénaux, la grande sensibilité de la cTn permet d’identifier la plupart des syndromes coronariens. Les dosages plus classiques tels que les CK et CK MB semblent par contre avoir perdu de l’importance et sont progressivement supplantés par le dosage des cTn dans la plupart des centres. Enfin de nouveaux marqueurs sont actuellement en validation clinique (BNP, CRP, ligand CD40, myélopéroxidase etc.).
Par ailleurs l’autre diagnostic, parfois dramatique si non diagnostiqué, est l’embolie pulmonaire pour laquelle les D-dimères gardent une place diagnostique fondamentale au vue de leur haute sensibilité permettant, en cas de résultat normal, d’écarter raisonnablement le diagnostic.
Les Marqueurs Cardiologiques En Salle D’urgence
Ces dernières années ont vu le développement de plusieurs nouveaux marqueurs en cardiologie qui se sont naturellement imposés dans la prise en charge des patients avec douleurs thoraciques ou dyspnée aux urgences.
La troponine I ou T est un marqueur sensible et spécifique de nécrose myocardique même minime qui apparaît dans le sang 4 à
6 heures après un épisode d’ischémie. Il a rapidement été intégré comme un composant essentiel du diagnostic d’infarctus du myocarde et son rôle pronostique a été bien démontré dans plusieurs études. Il est également un paramètre indispensable dans le choix du traitement, en particulier l’usage des inhibiteurs du glycorécepteur IIB/IIIA.
Le Brain Natriuretic Peptide (BNP ou NT-ProBNP) est une hormone sécrétée principalement par le myocarde ventriculaire en réponse à une surcharge chronique de pression ou à une ischémie. Son rôle a d’abord été évalué dans l’identification rapide aux urgences d’une dyspnée d’origine cardiaque. Il a montré une excellente valeur prédictive négative et s’est révélé très «cost-effective». Puis son intérêt dans le diagnostique et le suivi de l’insuffisance cardiaque a été bien établi. Il permet également de sélectionner les patients avec embolie pulmonaire candidats susceptibles de bénéficier d’une thrombolyse et de trier les patients avec syncope à mauvais pronostique nécessitant une prise en charge hospitalière.
Les D-dimères ont connu un regain d’intérêt. Leur valeur prédictive négative dans le diagnostique d’embolie pulmonaire a été confirmée et leur place dans l’algorithme des investigations de cette pathologie bien précisée. Leur élévation majeure en cas de dissection aortique peut être une aide au diagnostique de cette affection rare mais dévastatrice en cas de découverte tardive.
La recherche de nouveux marqueurs se concentre sur la découverte de substances révélatrices d’une ischémie myocardique en cours lors de douleurs thoraciques, permettant un diagnostique plus précoce d’un syndrome de menace, avant même la survenue de lésions.
Les Marqueurs de la Syncope
La syncope est une perte de connaissance et de tonus postural de récupération complète et spontanée. L’incidence annuelle moyenne de syncopes dans une population âgée de >18 ans est estimée à 7‰, mais cette dernière s’élève fortement dès 70 ans pour atteindre une valeur de 18‰ chez les sujets >80 ans. Face à un patient syncopal, la question suivante se pose: «la syncope de mon patient est-elle l’expression d’une maladie de mauvais pronostic?». Cette crainte nous pousse à exclure les causes «graves» en utilisant une pléthore de tests diagnostiques de faible rendement. Face à un patient syncopal, trois questions viennent à l’esprit: (1.) Quel est le pronostic de mon patient? (2.) Dois-je l’hospitaliser? (3.) Quelle est finalement la cause syncopale?
La proportion de mort subite dans une population syncopale non sélectionnée atteint 30% à cinque ans chez les patients souffrant de causes syncopales cardiaques, contre 5–10% chez ceux souffrant de causes non cardiaques ou indéterminées. Ainsi, le pronostic d’un patient syncopal dépend de la cause sousjacente, et si cette dernière est cardiaque, le pronostic est réservé. Plus récemment, la valeur pronostique d’une combinaison de paramètres comprenant la présence ou non d’une maladie CV sous-jacente et de symptômes (dyspnée, angor) a été testée dans une population syncopale non sélectionnée. L’absence de maladie CV sous-jacente et de limitation fonctionnelle est associée à un excellent pronostic. Au contraire, la présence d’une maladie CV, d’autant plus si cette dernière s’accompagne d’une limitation fonctionnelle, augmente le risque de décès d’un facteur 8 à 14 par rapport une population contrôle. La Société Européenne de Cardiologie a édicté récemment des recommandations tenant compte du nombre de syncopes, de leur sévérité, et de l’état CV sous-jacent. En présence d’un ECG et d’un examen clinique normaux et en l’absence de cardiopathie, les propositions sont de ne pas investiguer le patient ou de l’orienter vers des investigations fonctionnelles à la recherche de causes réflexes. En cas de maladie CV, d’exclure les causes de mauvais pronostic telles que cardiopathie dilatée, maladie coronaire, etc. à l’aide d’examens ciblés. Le Service de Cardiologie du CHUV met à disposition depuis 1999 une consultation de la syncope essentiellement sur un mode ambulatoire. Plus de 800 patients ont été vus à ce jour. Nous avons opté pour une standardisation du processus d’investigation en mettant l’accent sur la recherche de causes réflexes et psychogène à l’aide d’un tilt test, d’un massage du sinus carotidien et d’une épreuve d’hyperventilation. Nos données ont confirmé ce que la littérature nous a enseigné, à savoir que les causes réflexes (35%) et psychogènes (14%) constituent la source principale de malaises syncopaux, et que les causes sérieuses (ischémie, arythmies ventriculaires, épilepsies ~5%) restent rares.
Markers of Sudden Cardiac Death: Left Ventricular Systolic Dysfunction
Sudden cardiac death is most commonly caused by ventricular arrhythmias and is responsible for 50% of the mortality from cardiovascular disease in Western countries. Patients with severely impaired left ventricular systolic function (ejection fraction <30%) are among those at greatest risk for sudden cardiac death, regardless of the aetiology of heart disease. Patients with ischaemic heart disease and low ejection fraction have been the focus of many large randomised controlled trials of primary and secondary prevention of sudden cardiac death. In the MADIT II trial of patients with low ejection fraction and previous myocardial infarction, the all cause mortality was around 10% per year and could be reduced by 31% with the prophylactic implantation of a defibrillator. The mortality and the risk of sudden death appears similar in patients with nonischaemic cardiomyopathy and those with ischaemic cardiomyopathy. Additional risk factors for sudden cardiac death in patients with low ejection fraction include sustained ventricular arrhythmias, syncope, heart failure, and left bundle-branch block. Despite considerable advances in the treatment of heart failure over the past 20 years, mortality remains high with a four year survival of less than 50% in population based studies. In large heart failure trials yearly global mortality varies between 4–15% and averages 7–8%. Overall, about half of the deaths are sudden, but the proportion of patients dying suddenly (rather than from progressive pump failure) is highest among those with less severe heart failure (NYHA class II).
The echocardiogram remains one of the most powerful tools for risk stratification in patients with heart disease. Patients with severely impaired left ventricular function request careful evaluation and a high standard of pharmacological treatment. Despite optimal drug therapy, these patients remain at high risk of sudden cardiac death and most of them are therefore candidates for the implantation of a defibrillator according to the rules of evidence-based medicine.
Markers of Sudden Cardiac Death: ECG Abnormalities
Patients at high risk for arrhythmic sudden cardiac death can now be effectively treated by an implantable cardioverter defibrillator (ICD). However, an important clinical problem is the correct and prompt identification of patients at high risk. The surface ECG as a recording of the sum of the electrical activity of the heart remains even today a powerful and simple tool for this purpose.
An increased QRS voltage increases the risk of out of hospital cardiac arrest while in patients with suspected coronary artery disease an ECG pattern of isolated left anterior hemi-block may increase the risk of arrhythmic sudden cardiac death. Repolarisation abnormalities are another frequently useful ECG parameter. T wave alternant is being actively investigated as a marker of increased risk. A prolonged QT and QTc interval have been found to be independent risk factors for sudden death even in middle aged subject while their importance as a marker of risk in the congenital long QT syndromes is well known. Recently, gain of function mutations associated with a short QT interval has also been described in association with a syndrome of familial sudden death.
The classical delta wave of ventricular preexcitation, the typical coved ST elevation of the Brugada syndrome, the epsilon wave of arrhythmogenic right ventricular dysplasia are all relatively well known as pathognomonic ECG markers of a high risk for sudden death but can be easily overlooked.
The surface ECG a simple and nearly universal tool, offers an unparalleled overview of the electrical activity of the heart but must be integrated with all other clinical information and not be interpreted in isolation.